Personne en procédure d'asile

L'accélération ne doit pas prétériter l'équité et la qualité

04 février 2020

La nouvelle procédure d’asile a été introduite avec la volonté explicite d’être à la fois rapide et équitable. Or, après une année de mise en œuvre, force est de constater qu’elle présente certains déséquilibres. En effet, les autorités se concentrent sur l’accélération, quitte à négliger l’équité et la qualité des procédures.

La nouvelle procédure d’asile accélérée est entrée en vigueur en mars 2019. Depuis, en collaboration avec ses organisations partenaires, l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) joue un rôle central dans la protection juridique des personnes requérantes d’asile dans quatre des six régions d’asile de Suisse. L’OSAR considère que sa mission est d’accompagner d’un regard critique et spécialiste les changements du système et d’évaluer si et dans quelle mesure les objectifs fixés sont mis en œuvre et réalisés dans la pratique.

Le passage à la procédure menée de manière cadencée dans des centres d’asile fédéraux pose des défis majeurs à toutes les parties concernées. Le défi est élevé: la nouvelle procédure d’asile doit être à la fois rapide et équitable. C’est de ce double principe que dépendent le large soutien politique et l’acceptation du changement de système.

La pression des délais pèse sur la protection juridique

Le bilan de l’OSAR montre que les autorités ont surtout mis l’accent, au cours des dix premiers mois de mise en œuvre, sur l’augmentation de l’efficacité et de la rapidité de la nouvelle procédure d’asile. La procédure Dublin dure désormais 35 jours jusqu’à la décision de première instance, soit deux fois moins qu’auparavant. Quant à la procédure accélérée, sa durée a également été réduite par rapport à la phase test par le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) et s’élève à 50 jours à présent. Si ces accélérations sont possibles, c’est que les délais des procédures ont été raccourcis et que la marge de manœuvre dont disposent les autorités pour l’examen individuel de chaque cas n’est pas utilisée.

Cette pression des délais met à rude épreuve la protection juridique et prétérite l’équité et la qualité des procédures. D’autant plus que même les cas complexes n’entrent que trop rarement dans la procédure étendue, pourtant prévue à cet effet. Il en résulte une identification inadéquate des personnes ayant des besoins particuliers, une clarification insuffisante et incomplète des faits et, partant, des décisions d’asile incorrectes.

En témoigne la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral. La Cour renvoie de plus en plus d’affaires au SEM. Le problème est particulièrement aigu dans la procédure accélérée, comme le montre l’analyse de l’OSAR dans quatre des six régions d’asile: un recours sur trois introduit par la représentation juridique a abouti. Cela indique clairement que l’accélération du rythme des procédures se fait au détriment de la qualité des décisions.

Des adaptations sont nécessaires

L’OSAR continue de soutenir la nouvelle procédure et son objectif de renforcer les droits des personnes concernées, de mettre en œuvre des procédures rapides et équitables et de garantir une qualité élevée des décisions d’asile. Toutefois, son analyse montre que, pour atteindre ces objectifs, des adaptations du système sont nécessaires. L’OSAR demande davantage de temps pour les différentes étapes de la procédure, en particulier pour la préparation, la clarification des motifs d’exil et le processus de décision. Le temps alors investi se révélera doublement rentable au final: il garantira des décisions d’asile de qualité et permettra, partant, d’éviter de longues procédures de recours. L’essentiel est assuré, puisque l’accélération des procédures sera maintenue.

L’OSAR demande concrètement que les cas complexes soient affectés à la procédure étendue, où la clarification des cas individuels bénéficie de davantage de temps. Dans le cadre de la procédure accélérée, les délais devraient être plus souples et le délai de recours plus généreux. En outre, des processus uniformes et des améliorations en matière de coopération entre tous les acteurs et actrices sont nécessaires. C’est ainsi seulement que la protection juridique pourra assumer pleinement son rôle central de soutien aux procédures.

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