Du point de vue de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), les demandes d'asile font trop souvent l’objet d’une procédure dite accélérée. Le Tribunal administratif fédéral (TAF) s’est lui aussi à plusieurs reprises montré critique sur le type de procédure privilégié par le SEM. Pour la première fois, il le fait savoir de manière claire dans un arrêt qui fait référence : dans son arrêt, daté du 9 juin 2020, le TAF souligne que, dans la présente affaire, le SEM a soumis le requérant d'asile à deux longues auditions sur ses motifs d’asile. En outre, le tribunal rappelle que l’examen de l’affaire a nécessité l’analyse de nombreux dossiers. Enfin, il fait également remarquer que la décision d'asile a demandé un temps supérieur à la moyenne. Compte tenu, par ailleurs, de la durée totale de la procédure – près de trois mois –, il apparaît clairement, selon le TAF, qu'il ne saurait s’agir d'une demande d'asile pouvant être traitée rapidement : « Il ne peut donc être question d'une procédure simple avec un degré de complexité relativement faible, ne nécessitant pas d'éclaircissements supplémentaires après une audition détaillée. »
Cet arrêt du TAF vient renforcer la position des personnes en quête de protection en Suisse et confirmer les critiques déjà exprimées par l’OSAR. Le délai de recours de la procédure d'asile accélérée ne compte que sept jours ouvrables. Pour l’OSAR, il s’agit là d’un délai trop court en cas de décision d'asile potentiellement erronée. Selon le Tribunal administratif fédéral, traiter à tort une demande d'asile « complexe » dans le cadre de la procédure accélérée constitue une violation du droit à un recours effectif garanti par la Constitution pour les personnes en quête de protection. Il s’agit au contraire d’affecter ces personnes à la procédure dite étendue, qui offre davantage de temps pour mener des examens approfondis. Par ailleurs, les personnes concernées seront alors hébergées dans les cantons et non pas dans les grands centres fédéraux pour requérants d'asile souvent isolés.
Enfin, le TAF envoie deux autres signaux positifs. Premièrement, il laisse ouverte la possibilité pour le SEM et les autres parties concernées de s’accorder une durée de traitement plus longue dans la procédure accélérée. Ainsi, si le délai de 30 jours prévu pour une procédure accélérée ne peut être dépassé de manière massive, le TAF note toutefois, à l’instar de l’OSAR, qu'il existe une certaine marge de manœuvre de quelques jours. La TAF souligne en outre, à la fin de son arrêt, l'importance que revêt la protection juridique dans les nouvelles procédures d'asile : actrice essentielle du système d’asile, la protection juridique subit une forte pression en raison de la simultanéité des différentes étapes de la procédure et des exigences du calendrier. Il est donc d'autant plus important que le SEM effectue avec méticulosité le tri prévu par la loi dans la procédure de première instance. Dans le cas contraire, l'intention du législateur de procéder à une accélération des procédures dans le respect de l'État de droit et des exigences en matière d’équité ne pourra pas être garantie.