Dans un rapport publié le 8 janvier 2021, le Comité Helsinki Hongrois (HHC), une ONG de Budapest visant au respect des droits humains, accuse la Hongrie de poursuivre des refoulements vers la Serbie afin de limiter les demandes d’asile sur ces terres. D’après Info Migrants, qui s’appuie sur les données de la police hongroise, près de 2300 personnes ont été expulsées vers la Serbie sans procédure judiciaire au cours des seuls derniers mois. Cette pratique avait pourtant été condamnée par la Cour européenne de justice à la mi-décembre 2020.
L’ONG accuse par ailleurs Frontex de fermer les yeux sur ces violations systémiques des droits humains. Elle rappelle que l’agence européenne des gardes-frontières s'est engagé par le passé à se séparer des États membres ayant enfreint les droits humains. Or, Frontex est restée en Hongrie même après l’arrêt de la CJUE.
La publication de ce rapport intervient dans un contexte très critique à l’égard de Frontex, qui serait impliqué dans le refoulement de migrants en mer Méditerranée selon les recherches fondées de plusieurs médias. L’OSAR condamne fermement ces pratiques qui violent le droit international : elles privent les personnes requérantes d’asile de leur droit fondamental de déposer une demande d’asile.
Enquêtes ouvertes à l’encontre de Frontex
Le 12 janvier 2021, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a ouvert une enquête sur l'agence européenne des frontières, à la suite des allégations de refoulements dans la mer Egée. L'enquête est également susceptible d'impliquer d'éventuelles fautes de la part du chef de Frontex, Fabrice Leggeri.
Fabrice Leggeri a par ailleurs témoigné le 13 janvier 2021 devant les députés allemands de la commission des droits humains et de l’aide humanitaire à Berlin. Selon le communiqué du Bundestag, il a rejeté les accusations selon lesquelles des fonctionnaires de Frontex seraient impliqués dans des refoulements illégaux aux frontières extérieures de l’UE. Il a néanmoins reconnu que des « incidents » avaient eu lieu à la frontière maritime gréco-turque en mer Égée. Pour les députés de gauche, il est regrettable que l’agence continue de nier son implication dans des opérations de refoulements illégales, au vu de la quantité de preuves et de rapports fondés. Un autre groupe parlementaire s’est aussi interrogé sur les raisons des 40 postes d’observateurs des droits fondamentaux, toujours vacants et prévus par Frontex en vue de veiller au respect des droits humains dans les opérations de l’agence.
La Suisse participe aux engagements de Frontex
En tant que membre de Schengen/Dublin, la Suisse est étroitement liée à la politique migratoire de l’UE. Depuis, 2009, elle est en effet directement impliquée financièrement et opérationnellement dans Frontex. Le Corps suisse des gardes-frontières participe à des programmes de formation, à l’élaboration d’analyses de risques et à des opérations aux frontières extérieures de l’espace Schengen. D’ici à 2027, il est prévu que la Suisse envoie chaque année une quarantaine de membres du Corps suisses des gardes-frontières aux frontières extérieures de l’Europe. Ces derniers sont mis à disposition en majeure partie par l'Administration fédérale des douanes (AFD) ainsi que par le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) et les cantons.
A l’avenir, Frontex pourra aussi appuyer les États Schengen dans tous les aspects du retour de personnes en séjour illégal, comme par exemple le soutien en cas de retour volontaire ou l'obtention de documents de voyage.
Frontex en bref
Créée en 2004, Frontex vise à assurer et faciliter la coordination des opérations et soutenir les contrôles aux frontières. L’agence surveille et contrôle les frontières extérieures de l’UE en déployant des unités de police européennes. Ces dernières années, elle n’a cessé d’étendre ses activités aux frontières, devenant l’instrument central de la politique de repoussoir européenne. D’ici à 2027, elle veut rassembler un effectif de 10 000 gardes-frontières et gardes-côtes. Pour l’OSAR, cette évolution est préoccupante dans la mesure où Frontex évolue dans un domaine délicat en matière de droits humains.