Lors d’une conférence de presse le 8 mai 2024, le Conseil fédéral avait annoncé sa volonté de faire avancer l’intégration sur le marché du travail des personnes réfugiées protégées par le statut S. Il s’agissait d’accélérer leur intégration et d’accroître leur taux d’emploi par des mesures complémentaires de la Confédération, en sus du programme S et des mesures d’intégration cantonales, à l’instar de l’Agenda Intégration Suisse (AIS). Ce dernier prévoit l’intégration professionnelle durable des personnes réfugiées après un séjour nettement plus long en Suisse, à savoir sept ans. L’objectif ambitieux du Conseil fédéral vise un taux d’emploi de 40 % fin 2024 ou de 45 % fin 2025 pour les personnes au bénéfice du statut de protection S. Un système de malus est en outre à l’examen à la demande du Conseil fédéral afin d’accroître l’incitation financière à la réalisation des objectifs de taux d’emploi pour les cantons.
Le taux d’emploi valide la démarche suivie jusqu’ici
Le 14 janvier 2025, le SEM a publié deux fiches d’information concernant l’état actuel de l’intégration sur le marché du travail des personnes disposant du statut de protection S, qui se penchent également de plus près sur le taux d’emploi. Si, à première vue, le taux de 29,6 % fin 2024 manque largement l’objectif de 40 %, un examen plus attentif des chiffres révèle néanmoins une nette augmentation du nombre de bénéficiaires du statut S qui travaillent, sachant qu’il était de 21,1 % fin 2023. Mais une lecture nuancée de ces résultats s’impose, étant donné que beaucoup de ces personnes ne se trouvent en Suisse que depuis un an voire quelques mois. Considérant uniquement les personnes en Suisse depuis près de deux ans, le taux d’emploi atteint alors presque 38 %.
Les chiffres révèlent en outre de fortes différences entre cantons en matière d’intégration professionnelle. Les comparaisons directes ne s’avèrent toutefois ni pertinentes ni particulièrement utiles. En effet, le faible taux d’emploi dans certains cantons ne peut s’expliquer uniquement par l’engagement insuffisant des instances compétentes ou par l’absence de volonté d’intégration des personnes réfugiées qui y résident, mais plutôt par des facteurs tels que les conditions sur le marché du travail, sur lesquelles les cantons n’ont que très peu d’influence. De plus, les personnes en quête de protection venues d’Ukraine sont majoritairement des femmes avec des enfants à charge qui doivent aussi surmonter d’autres obstacles pour trouver un travail. L’OSAR estime qu’un soutien accru et des mesures concrètes dans le domaine de l’accueil d’enfants s’imposent.
Offrir des mesures d’intégration systématiques plutôt que faire pression
Selon l’OSAR, les données de la fiche d’information du SEM montrent une nette évolution positive. Il faut donc poursuivre et intensifier de manière ciblée les efforts collectifs à tous les niveaux, sans perdre de vue que les personnes dotées du statut de protection S, comme d’autres personnes réfugiées, se trouvent dans un long parcours d’intégration et sont confrontées aux mêmes difficultés fondamentales que les personnes déplacées par la guerre originaires d’autres pays. L'intégration des bénéficiaires du statut S n’est pas automatique, comme le souligne l’étude de l’institut pour la diversité et la participation sociale de la Haute école des sciences appliquées de Zurich (ZHAW). Elle requiert un soutien et un encouragement ciblés où l’acquisition de la langue, notamment, occupe un rôle central, puisqu’un niveau B1 est généralement exigé pour obtenir un emploi ou une place d’apprentissage.
L’OSAR juge peu judicieux, voire contreproductif, le mandat du Conseil fédéral portant sur l’examen d’un système de malus pour les cantons qui n’atteindraient pas le seuil de 40 % d’intégration professionnelle. En effet, les incitations négatives sont, par expérience, généralement inefficaces. Pour l’OSAR, l’intégration professionnelle des personnes réfugiées d’Ukraine doit nécessairement passer par un encouragement au moyen de mesures ciblées, la collaboration de toutes les parties prenantes et le maintien systématique des efforts fructueux d’intégration.