Regroupement familial : la CourEDH confirme que la condition de non-dépendance à l’aide sociale est trop sévère

05 juillet 2023

Les critères autorisant le regroupement familial des personnes réfugiées admises à titre provisoire sont trop stricts en Suisse. C’est la conclusion à laquelle est parvenue la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH) à Strasbourg. Dans un arrêt publié le 4 juillet 2023, elle a estimé que la Suisse avait violé le droit au respect de la vie familiale dans trois cas. Les autorités suisses avaient rejeté les demandes de regroupement familial au motif que les personnes réfugiées dépendaient de l’aide sociale. L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) salue ce jugement.

L’arrĂŞt de la CourEDH (case of B.F and others v. Sweitzerland) confirme la position dĂ©fendue par l’OSAR, qui estime depuis longtemps que les obstacles au regroupement familial des personnes rĂ©fugiĂ©es admises Ă  titre provisoire sont trop Ă©levĂ©s. La condition dĂ©sormais critiquĂ©e par le tribunal, Ă  savoir que les personnes rĂ©fugiĂ©es ne doivent pas dĂ©pendre de l’aide sociale pour faire venir les membres de leur famille proche en Suisse, est l’un d’eux.

L’OSAR s’engage pour que toutes les personnes bĂ©nĂ©ficiant d’une protection puissent exercer leur droit au regroupement familial. Ce droit est garanti aussi bien par les traitĂ©s internationaux relatifs aux droits humains que par la Constitution fĂ©dĂ©rale. La situation est particulièrement critique pour les personnes admises Ă  titre provisoire, qui sont concernĂ©es par cet arrĂŞt de la CourEDH. Les conditions Ă  satisfaire pour rĂ©unir leur famille sont particulièrement Ă©levĂ©es : elles doivent attendre un an et demi et remplir des conditions Ă©conomiques. Outre le fait d’être indĂ©pendantes financièrement, elles doivent Ă©galement disposer d’un logement suffisamment grand pour accueillir leur famille.

La CourEDH a maintenant établi que les circonstances individuelles des personnes réfugiées devaient être davantage prises en compte. Ainsi, si la personne concernée a par exemple fourni des efforts avérés pour assurer son indépendance financière, les autorités suisses ne peuvent pas imposer de manière inflexible le critère d’absence de dépendance à l’égard de l’aide sociale. Selon l’arrêt de la CourEDH, l’inaptitude médicale au travail doit également être prise en compte. Si ces circonstances individuelles ne sont pas suffisamment considérées lors de la décision, cela peut conduire à la séparation permanente des familles, constituant par la même une violation du droit au respect de la vie familiale.

De l’avis de l’OSAR, cette critique du tribunal devrait également conduire à un changement de pratique en matière de regroupement familial pour les personnes étrangères admises à titre provisoire. L’OSAR appelle les autorités suisses à examiner de manière plus différenciée l’absence de dépendance à l’égard de l’aide sociale pour toutes les demandes de regroupement familial de personnes admises provisoirement.

De manière générale, l’OSAR considère qu’il est nécessaire d’agir en matière d’admission provisoire et qu’il faudrait la remplacer par un statut de protection humanitaire (avis) placé sur le même plan juridique que celui des personnes réfugiées reconnues ayant obtenu l’asile. Toutes les personnes qui obtiennent une protection en Suisse ont besoin des mêmes droits fondamentaux pour pouvoir s’établir dans le pays.

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