Le verdict porte sur un Irakien souffrant de graves troubles psychiques et de problèmes physiques. Le SEM n’est pas entré en matière sur sa demande d’asile car conformément au règlement Dublin III, il a estimé que l’Italie était l’État compétent pour l’examen de sa demande. Depuis décembre 2019, pour transférer légalement des personnes gravement malades de Suisse vers l’Italie, il fallait obtenir des autorités de ce pays des garanties quant à une prise en charge et un hébergement adéquats. Malgré les indications fournies par le suivi médical de la personne concernée, le SEM a considéré que la maladie n’était pas suffisamment grave pour qu’il faille demander des garanties individuelles dans ce cas particulier. Dans son arrêt de référence (D-4235/2021) du 19 avril 2022, le Tribunal administratif fédéral juge que la gravité de la maladie n’est désormais plus pertinente si la personne n’a pas encore déposé de demande d’asile en Italie. En effet, dans ces cas, les requérant-e-s d’asile auraient accès aux prestations sociales, y compris aux soins et traitements nécessaires et urgents, immédiatement après leur arrivée en Italie.
Les explications du Tribunal sont diamétralement opposées aux conclusions de l’OSAR. Dans différents rapports, le plus récent datant de février 2022, l’OSAR a expliqué que l’accès au traitement des maladies psychiques est plus difficile en Italie. Il n’y a pas assez de places spécialisées, il manque des mécanismes d’identification pour les personnes vulnérables, qui doivent en outre faire face à des obstacles linguistiques. Le traitement dans les centres de premier accueil est ainsi limité à 15 minutes par personne et par mois, tandis que le nombre de places spécialisées dans le système de second accueil SAI est largement insuffisant pour couvrir les besoins. Selon les conclusions de l’OSAR, l’affirmation du tribunal selon laquelle les personnes transférées d’un État Dublin ont en principe accès, dès leur arrivée en Italie, aux prestations sociales, y compris aux soins et traitements nécessaires et urgents, est inexacte. Les personnes qui n’ont pas encore déposé de demande d’asile en Italie doivent, comme les autres requérant-e-s d’asile, déposer une demande d’asile auprès de l’autorité de police compétente (Questura) avant d’avoir accès aux prestations. L’accès à la procédure d’asile comporte également des obstacles et des temps d’attente parfois longs. Même après l’enregistrement, aucun hébergement n’est garanti et, par conséquent, aucune prise en charge adéquate.
Du point de vue de l’OSAR, cet arrêt est très décevant. La situation des personnes réfugiées en Italie reste problématique à de nombreux égards, notamment pour les personnes souffrant de maladies psychiques. Elle considère donc que l’assouplissement de l’obligation de demander des garanties avant d’éventuels transferts est problématique. Dans le même temps, elle insiste une nouvelle fois sur sa recommandation de renoncer de manière générale à transférer des personnes vers l’Italie si celles-ci ont besoin d’un traitement psychologique ou psychiatrique à long terme.
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